• CAMPING HS SUR LA N7 OU LE REVE DE MIREILLE

    Il y a quelques enfants afférés autour d'une grande balançoire plus loin sous une cahutte on prend une douche tandis qu'au loin des boules de pétanque claquent. Voilà quelques-uns des souvenirs de Mireille piochés parmi les mille clichés comme autant de visiteurs venus en son domaine. Depuis le début de années 60, la tenancière va et vient, pousse ici un tronc, défriche par là un espace. De ses rêves de Provence, de cette envie de poursuivre une vie débutée dans la tendresse d'une biscuiterie puis menacée par une terrible méningite, Mireille a dessiné un univers bien réel. A l'époque, cette dernière songe avec son compagnon, Charles a s'établir aux alentours de Marseille.

     

     

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    Au détour de conversations et comme une éclosion, l'idée du camping s'impose comme une évidence. Partis sur les routes en moto à la recherche de ce type d'Eden : les occasions sont rares d'en posséder un exemplaire. Par-là, de nombreux établissements sont visités comme une immersion dans le monde d'une petitesse toute sixties des tenanciers de camping. Tous sont bien actifs et sculptent leurs espaces, s'adaptant au tourisme de masse. Au détour d'un café pris sous une varangue, au long de toiles orangées, il y a d'abord les ralles d'un jeune teckel puis enfin une opportunité se profile.

    Du côté d'Aix-en-Provence, un camping serait à vendre. Un cas dont la rareté s'exprime par l'ancienneté constaté des patrons de terrain de camping. A l'arrivée du couple, les yeux d'un bleu pure de Mireille scintillent à l'orée de la propriété. L'ambiance n'est pourtant pas à la fête. Si la cime haute des arbres, le gazouillis des oiseaux charment les visiteurs, leurs hôtes plus âgés sont plongés dans l'insolente tristesse du deuil. Des souvenirs entassés dans le terrain, de ce fils perdu, là-bas au fond du terrain près du vieux transformateur : il fallait partir.

     

     

    En ce début des années 1960, Mireille et Charles s'établissent. Leurs affaires sont poussées dans l'ancien Relais de poste à cheval qui fait office de demeure. Très vite c’est l'effervescence sur le terrain, surtout pour Mireille qui se donne corps et bien tandis que son compagnon exerce sa profession de kinésithérapeute alentour. Dans cet élan, des enfants viennent au monde et s'agglomèrent dans ce qui devient un camping familial.

    Sous les arbres, les emplacements de l'ancien "International" sont améliorés, reliés par des traverse riches de leur gravillon. Comme un repère "l'Œuf" trône encore en édifice central dans la zone campeur. "L'Œuf" est un bâtiment ovoïde qui par la voie de Mireille recouvre ses fonctions sociales malgré son état délabré. A quelques mètres, un point sanitaire supporte péniblement ses portes vertes. La peinture écaillée est raccord avec l'émail éraillé des toilettes parfois turques. Mille fois souillés, les trônes sont à présent la proie d'une végétation luxuriante. Dans un local attenant, de l'eau coulait jadis au long de lavabos qui riaient du jaune de leur faïence. Sous la poussière, le travail de Charles donne à la pièce dévastée un charme d'éternité.

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    Si les mois d'été marquent l'intense des saisons, dès 1965, des campeurs sont fidèles tout au long de l'année comme en cet hiver 1975 où les campeurs sont présent en masse pour les fêtes de Noël. Il y a cette famille aixoise précieuse de son emplacement à quelques kilomètres de la ville ou cette femme de policier qui s'investie volontiers dans la vie du camping. Royal, Ista ou Bebelle la chèvre naine jappent, effraient le chaland hors zone. La cabane de bois au-devant est réservée aux bals qui un jour sur deux l'été assurent une ambiance festive tandis qu'un autre bâtiment fait office de réception. Derrière les vitres opaques de crasse un vieux frigo rappelle la présence d'un petit magasin. Quelques tracts en piles finissent de s'humidifier tandis que les parois de verre d'une cabine téléphonique démembrées attendent.

    Débarquant les paquets du coffre de l'Amie 8, les bras lestes, Mireille ravitaille ce qui pourrait s'apparenter à une guérite. Un litre de lait chocolaté bu au matin ici, une bouteille de Valstar sifflée par là comme autant de petits bonheurs vendus au pied de la tente. A l'ombre d'un vieux bus anglais une habituée attend paisible. En reste effectivement, un tertre de quelques mètres, le bus impérial : découpé puis en partie débarrassé par un ferrailleur. Entre deux rondins ramassés ou remisés en stock, Mireille poursuit vers un autre bloc sanitaire. Si l'appellation glace le sang, le raffinement de l'édifice en impose. "C'est l'alvéole" affirme fièrement Mireille au nom de son architecte de mari.

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    L'alvéole perdue à l'ombre d'arbres devenus fous, de plantes légères, était jadis le carré VIP du camping. La force des six emplacements résidait en l'accès pour chacun à une des alvéoles comme autant de douches et de WC privatifs. Au fond du chemin un arbre magnifique, plus fort que les autres, représente pour Mireille un lieu magique. Sous ce chêne vénérable hier comme aujourd'hui, Mireille livre son bonheur : l'impeccable du réseau électrique, le luxe des emplacements munis de lignes de téléphone privée. Un vieux tracteur assure en fond de scène protégeant un espace réservé aux reliques : quelques caravanes venues là aux beaux jours passés.

     

     

     

     

     

     


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