• LOGIS D'ANNE : LEUR BOUT DE FRANCE

    De vallons en collines

    A la découverte de la Durance depuis Aix-en-Provence, le passage sur le Pont Mirabeau est comme un point d'orgue. Tout près de là, jadis une femme prénomée Anne acquit le rang de Sainte. La pauvrette, gardienne de brebis tenait en sa chaumière une Sainte relique si bien qu'à son trépas un culte lui fut voué. Outre la réalisation d'une chapelle, la mémoire de son foyer lui demeura sous l'appelation le "Logis d'Anne". Ce lieu-dit représente pour le visiteur, l'automobiliste, une simple portion de route nationale n°96, entre la fin du village de Peyrolles et le Pont Mirabeau.

    Vue depuis le site du Camp du Logis d'Anne

    Pourtant, surplombant la Durance, à quelques mètres à peine se dressait encore il y a quelques années tout un village. La bastide nommée Logis d'Anne n'a rien à voir avec l'ensemble urbain disparu. Du reste, l'édifice bien que vieux de 250 ans est lui encore bien visible, restauré de propriétaire en propriétaire. En face, à l'ubac de la Durance, les baraquements, les bâtiments ont disparus. Du hameau forestier bâti à l'origine pour les ouvriers du Canal de Provence il ne reste rien.

    Ma France

    En 1948, la construction du Canal de Provence emploi de nombreux ouvriers. L'ouvrage d'adduction d'eau est creusé dans un secteur rural. Ce contexte spécifique implique la construction d'un lieu de vie dédié à l'accueil des exécutants pour un chantier programmé sur plusieurs années. Le site retenu au lieu-dit du Logis d'Anne est un plateau dominant la Durance et entouré de forêt. Les constructions sont rapidement édifiées. Faites de bois, de fibro ciment et d'amiante, les logis sont spartiates.

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    Rentrant du labeur, ceux qui permirent à la France provençale de ne pas s'assécher trouvaient en ces lieux un moment de repis. L'ouvrage finit, les ouvriers rentrèrent qui dans leurs pays, qui dans leurs régions. A l'arrivée des rapatriés d'Algérie en 62, seul le coiffeur, de ce qui était en train de devenir le "Camp de Harkis du logis d'Anne", était demeuré sur place avec huit ou neuf autres ouvriers du Canal. A partir de 1962, des camions militaires amenèrent par vagues ces nouveaux habitants. "Triés" au Camp de Rivesalte, les femmes, les enfants, les hommes, des familles entières étaient dispatchées à travers la France. Parmis les destinations de la SONACOTRA : "Le Logis d'Anne".

    Leurs voies se multiplies à n'en plus faire qu'une

    L'attribution des logements était organisée par le gestionnaire du site, la SONACOTRA. En bon administrateur, ce dernier distribuait les baraquements en fonction du nombre de personnes comprises dans les foyers. Les exilés devaient alors dans la hâte s'approprier ce qui s'apparentait à des cabannes forestières - à l'image de celles visibles dans ce sujet tourné pour un journal télévisé en 1976 titré "Les Harquis du Logis d'Anne à Jouques" in : http://www.ina.fr/fresques/reperes-mediterraneens/Html/PrincipaleAccueil.php?Id=Repmed00410. Pour d'autres plus proche de la route nationale, le contexte d'habitation était un batiment de type préfabriqué pourvu d'un étage.
    logis d'anne

    Très rapidement une centaine de familles furent établies au Logis d'Anne - la population s'élevait à environ 800 personnes . Pour ces individus victimes d'un violent déracinement, la chute fut rude. Posé au milieu de nul part, à plus de huit kilomètres du premier village, les solutions d'intégrations furent vite réduites. En sus, l'esthétique du village ne fut pas grandement améliorée depuis l'époque des créateurs du Canal de Provence. Il y eu bien quelques routes tracèes dans la pinède, quelques logements suplémentaires construits au milieu des années 1980, mais rien de significatif, de durable. Le repli de la communauté sur elle même était inévitable, comme organisé par la société.

    Les filles veulent aller au bal

    A la rudesse des hivers de Provence, les rapatriés n'eurent qu'à opposer le petit poël Gaudin compris dans le trousseau du gouvernement. Au dehors, c'était loin et cela d'un point de vue social comme d'un point de vue géographique. Comme une honte, ces hommes dont certains honorèrent la France par leur participation aux combats, étaient mis au rebus : cachés dans les bois. A l'arrêt de bus, au bord de cette nationale qui n'en finit plus, l'arrêt était facultatif : pour certains chauffeurs, comme pour tant d'autres locaux, cette population "d'Appache", de Harkis faisait peur. 

     

     

    Restes de jouets

    A ce titre, l'Ecole de la comune de Jouques n'assurait la scolarité des enfants du Logis d'Anne qu'à partir de la classe de CM1. De même en bon voisin, l'usine EDF du Canal, reliée à son ancien village d'ouvriers fit condamner la route. Ceux du Logis d'Anne ne pouvaient guère compter pour se distraire que sur le terrain de foot improvisé sur le champ d'un paysan compréhensif, de l'autre côté de la nationale. En haut, sous les arbres, la camionnette Citroën du boulanger assurait d'un coup de klaxon un semblant d'humanité tout comme les cérémonies de baptème ou de mariage fêtées en plein air dans les jardins inventés par les uns ou les autres.

    L'automne vient d'arriver

    Passé la hâte du retour, tout ne fut qu'illusion. Cette terre, ce refuge, loin d'être acquit ne resta qu'un support, car même s'y l'on meure au Hameau du Logis d'Anne on reste, enterré dans la gêne, au cimetière de Jouques. Dans le petit village, dont dépend le "Camp de Harkis", la plupart des habitants demeurent hostiles vis à vis de ces "étrangers". Cette mise à distance force bon nombre d'exilés à l'inactivité. Les employeurs locaux de l'époque rechignent à engager des "Logis d'Anne". Du fabricant de charcuterie industrielle aux entrepreneurs de travaux publiques spécialisés dans l'édification de site d'expérimentation nucléaire, tous semblent ignorer les nouveaux arrivants. Pour ces derniers, la fuite est alors inévitable à tout le moins pour ceux qui en on encore la force. Une vague d'expatriation à lieu des années 1970 à 1980 vers des destinations comme la Belgique, Paris ou encore l'Aveyron.

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    D'autres parmis les plus jeunes, font du Logis d'Anne un repère. De leurs vingt ans, ils partent découvrir le monde. Leur retour par intermittence permet au groupe de s'ouvrir sur d'autres cultures et notamment au travers de la musique des années 1970. Des bals ont parfois lieux. Certains en retrait partagent un air de jazz, un tube de Led Zepplin. Marqués à vif, blessés dans leur chair, les Rapatriés du Logis d'Anne cultivent avec puissance le savoir apporté - à l'appui ce sujet tourné pour un journal télévisé en 1991 montrant l'implication des "jeunes du Logis d'Anne" dans la cause Harkis in : http://209.85.229.132/search?q=cache:SiXAKn25FOkJ:www.harki.net/article.php%3Fid%3D415+%22logis+d%27anne%22&cd=9&hl=fr&ct=clnk&gl=fr. Affaiblis socialement par un isolement forcé, la communauté s'affirme politiquement galvanisée par les coups reçus, rendue forte par l'exercice de dissidence.

    Fermé definitivement en 1998, le Hameau forestier du Logis d'Anne fut petit à petit détruit. De cette place, de ces rires de gamins jouant dans leurs cabanes, de ces amants discrets du fond des bois il ne reste que quelques materiaux eparses. La société prudente a brisé jusqu'aux ecaliers de desserte des petits baraquements. Alentours, le calme d'avant 1948 est revenu avec en bémol le bruit des voitures fuyantes sur l'autoroute.

    Ils seront flics ou fonctionnaires

    Autour d'un café à Peyrolles, les plus jeunes des Anciens du Logis d'Anne sont nostalgiques. Pour certains, l'ascension du chemin abandonné, défoncé mille fois par les engins de destruction est un rituel sacré. Passé les grillages posés pour qu'on oublie, "tout redevient l'espace d'un moment comme avant". Sur place à l'ombre des pins centenaire, le film de l'enfance  se remet en route. De nouveaux tous blottis les uns contre les autres, seuls contre tous ou presque, si loin dans cette forêt.  

     

     La grotte, l'une des cabanes pour les enfants 

     Vue depuis Le Logis d'Anne

    "Automne 1974, les enfants de harkis du “Logis d’Anne” sur la commune de Peyrolles en Provence (bdr) ont compris que s'ils veulent quelque chose, ils doivent se révolter eux aussi contre le régime militaire dans les camps, la pauvreté extrême, le chômage, et le racisme dont font l'objet ces «Français musulmans" légende et photo in : www.gerard-bonnet.com/.../<wbr>6965/most_visited</wbr>  

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