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NOTRE RÊVE QUOTIDIEN
"la vieille qui gueule"
Toujours a la recherche de l´apocalypse, Paco et les autres cherchent a être là au bon moment. 20h20 caisse centrale : des hurlements. La voie d´une femme porte haut cris et insultes désuètes. A l´approche déja le monologue est plus audible, la crieuse promet sa fuite à la concurrence. De l´autre côté du comptoir, les agents de permanence de concert avec les vigiles patientent jusqu´à la fin de la tirade. D´un point de vue politiquement correct, la scène s´articule, chacun reprend ses courses, certains rangent à présent leurs portables : le film est posté.
Depuis quelques semaines, les ires se multiplies au centre commercial, certains clients fidèles depuis Rally ne reviendrons plus. Un vent de révolte souffle dans les rayons au Géant Casino du Jas-de-Boufan. Si de l´aveux du cadre de service les prix des articles ont considérablement chutté, il en irais de même pour les prestations offertes à tout le moins que le client croyait acquises. Comme un engrenage qui aurait rouillé, un ensemble de tétons non huilés, le monstre commercial semble chanceler.
En ce samedi de mars comme au dernieres heures d´ouvertures du lundi suivant, l´espace des caisses est comme une fresque des coulisses d´un paradis communiste perdu. Les clients doivent ainsi patienter quelques dizaines de minutes; pour la "vieille qui gueule" se sera 34 minutes pour passer en caisse. En coulisse, le directeur de l´établissement est montré du doigt avec lui les hauts dignitaires de Clermont-Ferrand qui feraient tout pour lester la barge.
Le programme de la direction laisse transparaître les ressorts d´une adaptation à la concurrence à marche forcée selon une équation dont les termes sont la baisse des prix et la gestion-pressurisation du personnel. Postes non remplacés, lá ou les agents patrouillaient en doublon, ces derniers envisagent à présent la prise de poste comme un moment de solitude souvent dans un contexte de gratuité : il s´agit d´assurer les heures de travail de ceux qui ont quitté le navire. Amer, le flôt de clients se tend au passage des caisses, tous irrités par l´absence de personnel tandis que les caissières, authentiques otages, doivent recueillir cette somme d´amertune. Sûre que derrière des perssiennes de bureaux laquées certains patientent. Finalement de simples spectateurs du processus antisocial en cours.
"l´homme de la caisse du Géant suit une BX"
En retrait de la scéne, un des client a renoncé : pressé par le temps. Dans quelques minutes l´individu a rendez-vous "2eme rond-point de Puyricard". Déja la BX patiente sur place. En un coup de phare, le type de la caisse du Géant suit l´inconnu à la BX dans la nuit. Au bout de quelques kilométres la vieille auto ne fait plus du tout raccord avec le paysage. Le portail se referme, c´est en auto qu´ils progressent dans l´immense propriéte. Devant ce qui semble être l´entrée principale la BX et la R5 sont a présent stationnées. A l´interieur, le propriétaire de l´immense demeure guide déja l´inconnu vers les sous-sol.
Contemplatif, l´homme de la caisse du Géant est tres satisfait par ce qu´il voit. Du reste, son hôte ne demeure pas de marbre : ses yeux brillent devant la chose. Sans âme il pousse une lourde porte métallique. L´homme de la caisse du Géant reste en retrait, plein de compation puis a l´appel de l´inconnu apporte son aide. Dans l´action, Anatole se présente à Bertrand, s´épanche enfin quant à ses émotions. Très triste, c´est avec grand regret qu´Anatole cède sa vieille R5. Les 100 euros sont échangés, Anatole regarde les deux autos attachées partir avec le gars du Bon Coin.
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