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Par meliflore le 2 Mars 2010 à 19:56
Rien ne va plus sur le périphérique pour les derniers de ses squatters. La rocade aixoise au fil des ans a pris de plus en plus d'allure en terme esthétique alors que celles des véhicules y circulant tend à se réduire. Au bord des voies réservées aux bus, les demeures qui pour certaines sont des sortes d'hôtels particuliers, sont réhabilitées, réentretenues au plus juste : comme un second souffle après une longue période de léthargie.<o:p></o:p>
Si la circulation au sein de l'artère reste très dense, l'aversion commune pour le périph semble en voie de se résorber. Du coup, fleurissent çà et là les nécessaires équipements de double-vitrage, les panneaux invitant à la location, une enseigne notariale. Un à un, les biens qui ne l'étaient sont réhabilités. En témoigne l'actualité de cette maison de ville centenaire posée le long du périphérique et de la Traverse Saint-Pierre. En ce mois de mars l'activité bas son plein, des ouvriers s'activent à rendre l'édifice habitable selon les critères de la SCI nouvelle propriétaire de l'édifice.
D'un nom éponyme à une célèbre firme de gestion financière, la société s'affiche sur le permis de construire apposé au portillon forgé de la maison. La mise en chantier actuelle de la demeure ressort comme un des maillons du processus de changement de destination du site. Avant de jetter au dehors quelques matelas de mousse laissés, de procéder à l'habillage administratif du portillon, la SCI a dû faire place nette.
La fin du Club des cinq avait sonné et cette fois-ci c'était pour de bon. Les méchants n'étaient plus des avatars ou un délire sur monde aux ombres paranoïaques. Sans heurt mais fermement, les agents s'étaient introduit sur place depuis bientôt deux jours.
Le Club des cinq : une réunion de squatters dans la vingtaine style baggi. Peu de violence émane du groupe dont les attributs évoquent bien plus un référentiel artistique, l'échappée romanesque dans le frais de la jeunesse qu'une arrière-salle de la misère humaine. Dans la maison chacun à son étage comme chez lui et le salon pour tous avec en guest les meubles et restes de celle qui fut jadis la Maitresse des lieux. L'héritage au ton baroque n'est pas masqué ni mis en caisse mais mêlé aux biens plus modernes de ces squatters urbains.
Dehors, les agents devisent. Ils sont tranquilles, bien à l'abri dans le jardin de la maison jouxtant la Traverse Saint-Pierre. Le carré de verdure est un peu la botte secrète du Club des cinq et comme un rêve pour l'habitant des villes. Réunis autour de leur véhicule, les agents, sorte de vigiles des temps modernes, échanges en langue russe. De noir vêtu, les hommes, le plus souvent en binome voir en trio, évoquent par leur silouhette athlétique mais ferme la rigueur d'une armée soviétique idéale.
Au demeurant, la discussion semble impossible. Pourtant, Slavco et les autres parlent un français presque parfait et pourraient de ce fait entamer un dialogue avec le Club des 5, un de ses émissaires. Or à 21h23 ce jeudi de mi février 2010 il n'en n'est rien. Chacuns campents sur ses positions, les uns crispés mais au dedans, les autres dans l''esprit taf mais au froid. Le chien du Club abois dans la nuit et gratte à la porte du jardin. Pour Slavco "c'est pas problème, nous attendre pour mettre à eux dehors", la stratégie est donc orientée par une logique de patience. Les tenues aux relans militaires, les rangers cirées restent de circonstance mais il s'agit de respecter les lois car d'après Slavco "en Russie ça pas possible, eux pas chez eux, on mettrait dehors tout de suite".
Furtivement, l'un des vigiles installés sous un abri, sorte de grange de fond de terrain, évoque une possibilité d'enfummage de la maison pour l'eviction définitive des occupants. Plus tard, il est convenu entre les professionnels de surveiller les allers et venues des membre du Club afin d'appliquer la politique "toute sortie est définitive". La tension au bout de trois jours de cohabitation est perceptible. Bientôt, en plus de la présence des agents vigiles de nuit comme de jour, les squatters doivent composer avec la présence d'ouvriers mandatés par le propriétaire pour effectuer des travaux. Ces nouveaux agents sont contenus un temps dans le jardin mais au dedans, l'affolement est de mise et la possibilité de la perte du repère, de cette perle désabandonnée envisagée.
Au fil des heures, les filets des agents vigiles regorgent de poissons et pour ces derniers, la nasse est l'exterieur. Devant le portillon face à la porte d'entrée, les vigiles sont intraitables : ils n'effectueront aucun relachage dans l'aquarium. Raccrochés à leurs portables et sonnés, les squatters anguillent et tentent de manoeuvrer au téléphone, d'obtenir un dernier sursis. Comme une lettre morte ni les gouttes de pluie, ni les policiers municipaux arrivés sur les lieux n'exauceront leur souhait. Sans heurt particulier, la cause semble être entendue. Slavco suit de loin le départ du petit groupe, goutant à la satisfaction du devoir accomplit, contemplant le vide de la propriété.
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